C’est avec un peu d’émotion que nous nous préparons pour la dernière partie de notre voyage.
Notre étape française aura duré presque 3 semaines. C’est à la fois court et long. Trop court pour mettre le blog à jour par exemple ! Et trop court pour repartir avec un itinéraire tout ficelé pour les prochains mois (et puis, en a-t-on vraiment envie ?). Mais assez long pour passer un week-end au ski avec les copains, un dimanche en famille en Ardèche pour ramasser des jonquilles, faire un petit tour à Vienne, Marseille et Lyon, lire le guide sur la Grèce, changer un peu de matériel et de vêtements, faire des rappels de vaccins, une nouvelle procuration pour les législatives en juin (la première se périmant le 11 juin), tenter de ré-inscrire les enfants pour la rentrée 2022 (ça, c’est encore en cours !) et faire un apéroussel.
Petit moment d’inquiétude lorsque nous avons repris contact avec Spas, le bulgare qui gardait nos vélos. Après 3 jours sans réponse à nos messages, nous avons contacté l’hôtel où il travaillait en septembre dernier. Et là, gros soulagement, il était toujours vivant et avait simplement changé de numéro.
Pour aller à Sofia, c’est facile, il suffit de prendre le bus à Saint Etienne, et c’est tout droit !
Bon, tout droit, pas tout à fait, mais c’est direct en tout cas. On monte dedans et 30h plus tard, on est dans le centre de Sofia !
Pourquoi prendre le bus ? C’est une question qu’on nous a beaucoup posé lorsque nous avons choisi ce moyen de transport en septembre dernier pour revenir en France. Même les bulgares ne comprenaient pas pourquoi nous ne prenions pas l’avion. Mais en dehors de l’aspect pratique de revenir avec un unique moyen de transport, sans correspondance, et qui nous dépose presque devant chez nous, il avait aussi l’idée de NE PAS prendre l’avion.
Il y a tout d’abord l’aspect écologique. Quand on n’est pas contraint par le temps, il nous parait important de choisir les transports les moins polluants possible. Mais ce n’était pas la seule raison. Quand on vient de parcourir plus de 3500 km en vélo à travers l’Europe, que l’on a expérimenté à la fois ses différences culturelles, mais aussi une certaine continuité entre les pays, été confronté à ses frontières, invisibles ou ultra sécurisées, quand on a expérimenté physiquement, dans son corps, sa géographie, avec ses plaines interminables, ses collines, ses gorges, ses montagnes et son Danube si changeant, quand on a, enfin, connu une relation au temps différente, il est assez violent de monter dans un avion et de faire le chemin inverse en quelques heures, comme si tout cela n’existait plus.
Ce trajet Sofia-Saint Etienne s’étant très bien passé, c’est tout naturellement que nous avons repris le même bus dans l’autre sens pour retourner à Sofia. Le bus part en réalité de Madrid. Nous ne connaissons pas toutes les étapes françaises mais nous savons qu’il passe par Bordeaux, Saint Etienne, Lyon, et Chambéry. Direction ensuite l’Italie par le tunnel du fréjus avec notamment une étape à Milan et Vérone. Puis la Slovénie, la Croatie, la Serbie et enfin la Bulgarie.
Mercredi matin, le réveil a donc sonné à 3h15 du matin. Première surprise de la journée, Gaëtan a de la fièvre. La pharmacie étant rangée dans les sacs au fond du coffre, je récupère un stock de doliprane dans la réserve et à 3h45, nous quittons Coise. 1h plus tard, nous sommes à la gare de Saint Etienne, en compagnie de Xavier qui récupère notre voiture à chacun de nos départs. Le bus est déjà là et le chauffeur est en train d’enregistrer des passagers. Heureusement, que nous avons entassé nos sacoches de vélo dans de vieux sacs de voyage car nous n’avons droit qu’à un sac par personne (peu importe la taille semble-t-il, tant qu’il n’a qu’une étiquette à coller sur la liste des passager). Nous ne sommes pas les seuls à grimper dans le bus à Saint Etienne, mais manifestement, nous sommes les seuls Français dans le bus. Au moins, cela nous met tout de suite dans le bain du voyage !
Cette fois ci, le bus est plein, pas question de s’étaler sur la rangée du fond. Et manque de bol, nous avons juste derrière nous une famille avec 4 enfants, dont un bébé qui n’a pas l’air d’être un fan des voyages en bus. Mais finalement, il a plutôt bien dormi durant les heures de nuit. Nous avons aussi un voisin qui parle assez bien français et qui nous a plusieurs fois traduit les consignes du chauffeur ou des gardes aux passages de frontière, ce qui nous a facilité les choses.
Vu le réveil très matinal, nous avons tous dormi un peu le matin, puis fait des siestes l’après midi. Plus quelques petits dessins animés et un peu de blog, le temps est passé très vite.
Cette fois-ci, plus de masque dans le bus et nous pouvons manger à l’intérieur, ce qui facilite les choses. La Serbie est le seul pays a ne pas être dans l’union européenne, mais il y a tout de même des contrôles de passeport pour d’autres frontières (Slovénie et/ou Croatie, on n’était pas bien réveillé, on ne sait déjà plus). Les gardes sont sympas avec les enfants. Lorsque le passage de la frontière se fait en pleine nuit, ils peuvent rester dans le bus avec un adulte. Les gardes se contentent alors de venir vérifier que le nombre de personnes restées dans le bus colle avec le nombre de passeport qu’on leur à montré.
Nous montrons notre pass sanitaire pour l’entrée en Bulgarie. Heureusement, qu’il n’y a pas de contrôles de température comme en Colombie sinon, on serait resté à la porte de la Bulgarie, vue la température de Gaëtan (malgré le doliprane) !
Préparation de l’itinéraire en Bulgarie
Nous arrivons à Sofia un peu avant midi (avec +1h de décalage horaire). Cela fait vraiment bizarre de se retrouver dans la gare routière d’où nous étions partis il y a 6 mois (6 mois, vraiment, mais où sont ils passés ???!!!).
Nous nous installons à l’apparthôtel Bon Bon, où travaille Spas, le bulgare qui a mis nos vélos dans un appartement de sa famille à Slivnitsa à une trentaine de km de Sofia. Il est tout sourire à la réception, ce qui nous rassure sur l’état des vélos. Ici, il y a quelques chambres en mode « apparthôtel ». C’est ouvert depuis peu et nous avons 2 chambres jumelées très sympas. Il fait froid dehors, et il pleut par intermittence. Comme Gaëtan a toujours de la fièvre, nous annulons la sortie prévue ce soir et décidons de tout décaler d’une journée : la récupération des vélos (de toute façon, nous n’avons pas trouvé de camionnette à louer pour aller chercher les vélos demain) et l’arrivée à Bankya, chez la famille bulgare où nous étions en septembre dernier (arriver avec un enfant malade dans une famille, c’est quand même pas très cool).
Nous passons la soirée à étudier l’itinéraire préparé par Michaël. Il y a 2 options pour rejoindre la frontière, au sud de Sofia.
- Soit nous passons par la Macédoine du Nord, à l’Ouest de la Bulgarie pour rejoindre l’Eurovélo 13. Cet itinéraire revient ensuite en Bulgarie pour longer la chaîne de montagne qui fait la frontière avec la Grèce et nous conduit à passer par le gros poste frontière et une autoroute. Personnellement, j’aimais bien l’idée d’aller en Macédoine (peut être parce que je les ai vu éliminer l’Italie de la prochaine coupe du monde de foot). Mais cela présente des inconvénients liés au fait que la Macédoine n’est pas dans l’UE (suite notamment à un véto de la Bulgarie). Cela complique par exemple le passage de la frontière en période Covid (pass européen pas forcément reconnu, encore des tests PCR à faire …) et nos forfaits internet ne fonctionneront pas. Cela complique fortement la recherche de logement sur notre trajet et vu les températures actuelles, on va avoir besoin de dormir en dur au moins les 2 prochaines semaines.
- Soit nous partons vers l’Est de Sofia pour rejoindre un autre poste frontière plus petit donc plus facile à passer en vélo. Si on prend cette option, je milite pour aller jusqu’à Plovdiv, même si cela nous rallonge un peu. Le trajet présentant le moins de dénivelé comporte une partie d’au moins 40km de montée dans une zone montagneuse totalement déserte. C’est certainement très sympa en été, quand on peut bivouaquer en forêt, mais ce n’est pas envisageable en avril, avec la neige et des températures négatives la nuit. Du coup, nous étudions une autre option qui passe par Batak, (conseil de Un monde à vélo) puis Vélingrad et ses sources chaudes (ça, c’est un ajout personnel car j’adore les sources chaudes !) puis Yundola et ensuite, on descend jusqu’à la frontière.
En tout cas, quelle que soit l’option, ça va grimper sérieusement !
Après le froid, nous avons une magnifique journée printanière (ou comme dit Spas, en ce moment, c’est jeudi ski et vendredi plage)
Ce vendredi matin, nous retrouvons Georgi (de Bankya) qui vient déposer son fils à l’école, pas très loin de notre hôtel. Nous profitons qu’il soit en voiture pour lui donner une bonne partie de nos affaires. Nous avons en effet prévu d’aller récupérer les vélos le lendemain en train, puis de faire le trajet Slivnitsa-Bankya en vélo. Et pour commencer en douceur et se faciliter le trajet en train, il nous faut voyager léger. Cela fait plaisir de revoir Georgi et Vladi. Et tout autant de se balader sous un beau ciel bleu, avec les montagnes enneigées en toile de fond et le soleil qui chauffe dès 8h du matin.
Après une matinée tranquille, Gaëtan ayant repris du poil de la bête, nous partons faire un tour dans Sofia. Hier, nous sommes juste sortis manger et nous n’avons pas été très loin. Du coup, les enfants n’ont pas reconnu la ville et n’ont pas l’impression d’être de retour en Bulgarie. Mais cette fois-ci, nous marchons jusqu’au centre. Lorsque nous arrivons au niveau de la basilique Sainte Sophie et de la cathédrale Saint Alexandre-Nevski, les souvenirs reviennent : la flamme qui brûle au monument du soldat inconnu, la statue du lion juste à côté et aussi ce colosse au regard terrifiant dans l’allée. Ils sont tout heureux de reconnaître ces endroits et d’être de retour à Sofia (même si Léa s’obstine à dire « Bogotà » !).
Après le pique nique dans l’herbe, nous refaisons en sens inverse le circuit de la visite guidée faite en septembre. C’est amusant de voir en version printanière, les parcs où nous nous étions promené au début de l’automne. Il y a beaucoup plus de touristes qu’en septembre et nous croisons de nombreux groupes qui visitent le centre ville. Le bon côté des choses, c’est que les restrictions liées au covid sont toutes levées et certains monuments, qui étaient fermés la dernière fois sont de nouveau ouverts. Nous pouvons ainsi visiter la rotonde Saint George et l’église Sveta Petka. Malheureusement, l’hôtel Arena di Serdica est toujours fermé. Nous ne verrons donc pas les ruines de l’amphithéâtre (l’hôtel est construit dessus !).
Nos bouteilles d’eau sont vides alors nous filons du côté du musée d’histoire car c’est là que se trouvent les sources minérales chaudes. Et pour cause, le bâtiment qui abrite le musée est en fait l’ancien bain public et établissement thermal de Sofia. Il y a un projet pour refaire des thermes à cet endroit. C’est une excellente idée !
Nous avons beaucoup marché et il est temps de de se poser quelque part. Nous prenons tranquillement la direction du parc du monument à l’armée soviétique (vous savez, celui avec le père Noël) en faisant des arrêts dans les autres parcs sur notre trajet. C’est ici que nous donnons rendez-vous à Véra et Denis. Nous avons fait leur connaissance lors de notre weekend à la montagne fin septembre et avions dîné ensemble pour notre dernière soirée à Sofia. Véra a appris le français lorsqu’elle vivait en Algérie avec ses parents et Denis est scolarisé au lycée français (en primaire). Les enfants sont donc supers contents de retrouver un copain qui parle français.
Les enfants jouent à cache cache pendant que nous discutons avec Véra en profitant de cette magnifique fin de journée. C’est vrai que depuis 9 mois maintenant, nous passons presque toutes nos journées dehors, et avec l’Afrique et la Colombie, nous ne sommes pas en manque de soleil mais ici, c’est un des premiers jours vraiment chaud. Et pour le coup, il fait déjà 24°C !!!
Nota : Véra nous explique la coutume de la martenitsa (voir ici pour l’histoire complète ou dans les photos pour un résumé).
Pour dîner, Véra nous conduit dans un parc voisin. Il est immense et plus nous avançons, plus nous avons l’impression d’entrer carrément dans une forêt. A 2 pas du centre de Sofia, c’est vraiment sympa. Nous allons dîner au Маймунарника (c’est à dire au Maymunarnica), un espace en plein air délimité par une palissade en bois. On s’y sent tout de suite bien et on imagine sans problème l’ambiance qui doit régner en été, pour les soirées concerts. C’est déjà bien plein en ce début d’avril et nous prenons la dernière table. C’est l’occasion de se remettre à la cuisine bulgare comme la salade schopska et le tarator (sous ce nom redoutable se cache une innocente soupe de yaourt au concombre) pendant que les enfants jouent à loup-bougie. Quelle belle nuit !